Se loger est un besoin vital. Guidés par l’idée reçue que louer c’est jeter l’argent par les fenêtres, nous préférons systématiquement devenir propriétaires de notre résidence principale sans établir un parallèle avec la location. Or, si nous étions des agents économiques rationnels, nous poserions la question suivante : ai-je intérêt à être propriétaire ou locataire de ma résidence principale ?
Pour répondre à cette question, il convient de comparer le coût de l’achat à celui de la location et de calculer le nombre d’années de détention nécessaire pour que l’achat de la résidence principale soit équivalent à celui de la location. Bien évidemment, l’exercice n’est pas simple car il englobe à la fois des éléments actuels (niveau des taux d’emprunt, prix de l’immobilier, prix des locations) mais également futurs tels que l’évolution des prix de l’immobilier, de l’inflation, des locations et des taux d’intérêt.
Dans ses études « Acheter ou louer » basées sur un appartement de 70 M² sur les principales villes françaises, meilleurtaux.com note un changement total de paradigme comme le démontre le tableau ci-contre. En 2023, il faut conserver son bien au-delà de 15,6 années pour que l’achat devienne plus rentable que la location. Il s’agit d’un net revirement puisqu’avant 2020, la période moyenne requise pour que l’achat soit moins coûteux que la location était très faible, oscillant entre 1,9 an (2019) et 4,3 ans (2014).
Depuis 2021, cette période n’a cessé de progresser pour être pratiquement multipliée par 3 passant de 5,8 ans en 2021 à 15,6 ans en 2023. Cette moyenne cache des disparités importantes avec des délais multipliés par plus de 10 sur les 3 dernières années. La palme revient à Perpignan avec un délai multiplié par 100 puis à Reims (x17), Le Mans (x16), Dijon (x11) et Le Havre (x10).
Cette forte hausse du délai moyen est la conséquence directe de la hausse des taux des crédits immobiliers sans que la baisse des prix immobiliers ne se fasse encore pleinement ressentir. Il faut garder en mémoire que le marché de l’immobilier d’habitation est directement lié au pouvoir d’achat des ménages qui diminue proportionnellement à la hausse des taux d’intérêt. Une augmentation de 1 % des taux des emprunts a pour conséquence de générer une baisse de 8 % du pouvoir d’achat entrainant inévitablement un recul du prix des logements.
Si, pour la plupart des villes, le délai moyen a augmenté, certaines villes telles que Marseille, Lyon, Rouen, Metz et Orléans enregistrent une réduction significative en raison de la baisse des prix de l’immobilier et de l’augmentation du prix des locations. La plus forte amplitude est constatée à Marseille avec un recul de 7 ans suivi par Lyon (- 6 ans).
En conclusion, en raison de la hausse des taux d’intérêt et de la baisse des prix attendus des logements, il est préférable, en 2023, de rester locataire de sa résidence principale. Lorsque la baisse des prix aura été effective, le délai se réduira pour redevenir proche de son point d’équilibre fixé à 7 ans. Seules deux villes sont actuellement en deçà de cette limite : Mulhouse et St Etienne pour lesquelles l’achat est à privilégier.