Les marchés boursiers volent de records en records tant en Europe qu’outre Atlantique. Ainsi, le CAC 40 qui reflète la santé de nos 40 plus belles entreprises a franchi, en ce mois de mai 2024, le cap des 8 200 points et le Dow Jones celui des 40 000 points. En tant qu’être rationnel, face à de tels sommets, vous pensez probablement que le niveau atteint par les marchés est trop élevé et qu’il est temps de se remémorer le vieil adage : « les arbres ne grimpent pas jusqu’au ciel » !

En clair, vous avez le sentiment qu’il est trop tard pour investir et qu’il est urgent de prendre vos bénéfices avant que les marchés boursiers ne chutent.

L’être humain n’ayant pas la faculté de prévoir l’avenir, seule la référence au passé est possible pour analyser de semblables situations. C’est justement à cet exercice que s’est livrée la société de gestion Schroders en se plongeant dans l’histoire boursière américaine depuis 1926. Il en ressort que le marché a franchi de nouveaux sommets beaucoup plus fréquemment qu’on ne le pense. Ainsi, sur les 1 176 mois écoulés depuis janvier 1926, le marché a atteint un sommet historique 354 mois, soit 30 % du temps. Et, en moyenne, les performances sur une période de 12 mois suivant l’atteinte d’un sommet historique ont été supérieures de près de 2 points (10,30 % contre 8,60 %) par rapport aux périodes où le marché n'a pas atteint son pic. Les performances sur un horizon de deux ou trois ans ont également été légèrement supérieures en moyenne. Si vous aviez investi 100 dollars sur le marché boursier américain en janvier 1926, cet investissement serait valorisé à 85 008 dollars à la fin de 2023 en termes réels, c’est-à-dire inflation déduite, ce qui représente une croissance moyenne de 7,1 % par an. En revanche, si vous aviez cédé vos actions au profit d’un investissement liquide et non risqué tel qu’une sicav monétaire, à chaque fois que le marché a atteint un sommet historique pour revenir à l’achat sur les actions lorsque le marché repasse sous son point haut, votre capital ne serait plus que 8 790 dollars, soit un manque à gagner de 90% ! La performance de ce portefeuille n’aurait été alors que de 4,7%, inflation déduite. Il en découle que, sur de longues périodes, les écarts de performance peuvent être considérables. Sur des périodes plus courtes, le constat est le même puisque la destruction de richesse ressort à 23 % sur une période de 10 ans (237 dollars contre 181 dollars), 33 % sur 20 ans (382 dollars contre 255 dollars), 53 % sur 30 ans (864 dollars contre 403 dollars) et 61 % sur 50 ans (3 031 dollars contre 1 180 dollars).

L’étude de Schroders démontre que, s’il est légitime de ressentir une certaine nervosité à l’idée d’investir lorsque le marché atteint un sommet historique, céder à cette appréhension s’avère être préjudiciable. Il peut bien évidemment y avoir des raisons légitimes de ne pas privilégier les actions mais certainement pas le fait que le marché ait atteint un record.

Quoiqu’il en soit, les marchés boursiers sont jugés trop risqués par la plupart des épargnants en raison de la décorrélation des sphères financières et économiques et des fluctuations excessives. Cette volatilité est liée au fait que le marché des actions est liquide ce qui induit qu’à court terme, le prix peut ne pas refléter la valeur des entreprises car la cotation dépend avant tout de la loi de l’offre et la demande. Au plus de personnes vont acheter une action, au plus celle-ci va voir son cours s’apprécier ou se déprécier lorsque le nombre des vendeurs excède celui des acheteurs sans corrélation directe avec la santé de l’entreprise. Toutefois, sur le long terme, ces fluctuations erratiques sont gommées et la tendance reflète la croissance des entreprises. Dans notre économie capitaliste, où la règle est le profit, les entreprises s’enrichissent et se développent d’où une inévitable progression de la bourse sur longue période.

Autrement dit, s’il est indéniable que les marchés boursiers sont risqués et volatils, ce phénomène s’estompe mécaniquement avec le temps. En effet, sur longue période, à la condition de bien diversifier son portefeuille, le risque de perte devient quasi nul après 10 ans, pour disparaître totalement après 15 ans. La raison en est que, sur le long terme, les actions voient systématiquement leur cours croître en raison de la création de richesse générée par les entreprises neutralisant ainsi les fluctuations et les aléas conjoncturels.

Cette crainte des marchés boursiers est davantage prononcée en France que dans les autres pays. Pour preuve, les actions cotées ne représentent que 5,3 % des actifs financiers des ménages français tandis qu’Outre-Atlantique le seuil des 50 % est dépassé.

Ce sentiment de défiance vis-à-vis des marchés boursiers est accentué par le fait que notre indice national, le CAC 40, n’intègre pas les dividendes dans son calcul tandis que, par exemple, chez nos voisins allemands, le DAX, qui englobe les 40 plus grosses sociétés allemandes, prend en compte le réinvestissement des dividendes. Cela induit une différence notoire et joue un rôle important sur l’inconscient collectif.

Pour comprendre ce phénomène, remontons début septembre 2000, à l’aube du krach lié à l’explosion de la bulle internet et plus précisément au 4 septembre 2000, jour où le cours du CAC 40 avait atteint un point haut à 6 944,77 points avant de connaître une chute. Ce même jour, la cotation du DAX ressortait à 7 355,74 points soit à 620 points de son record fixé à 7 975,95 points en date du 10 mars 2000.

Suite au krach boursier, le DAX a recouvré le niveau des 7 976 points dès le 1er juin 2007 tandis que, pour le CAC 40, le niveau des 6 945 points ne fut franchi que le 3 novembre 2021.

Ces chiffres sont éloquents : suite au krach des années 2000, l’épargnant qui a investi sur le DAX a mis 2 639 jours (soit un peu moins de 7 ans et 3 mois) pour retrouver sa mise contre 7 730 jours (soit 21 ans et 2 mois) pour celui qui a misé sur le CAC 40.

Cet écart phénoménal est toutefois trompeur puisque ces deux indices ne sont pas comparables car l’un intègre le réinvestissement des dividendes ce qui n’est pas le cas du CAC 40.

Pour disposer d’une information claire et non trompeuse, il convient de comparer le DAX au CAC 40 dividendes réinvestis soit le CAC 40 GR.

Dans ce cas, le délai de recouvrement du CAC 40 GR ressort à 2 415 jours (soit 6 ans et 7 mois) puisque, dès le 14 avril 2007, il avait dépassé son niveau de septembre 2000. Il est à noter qu’en dépit des apparences, la performance du CAC se trouve être meilleure que celle du DAX !

En clair, l’investisseur malchanceux, qui aurait investi sur le CAC 40 le 4 septembre 2000, aurait retrouvé sa mise au bout de 6 ans et 7 mois compte tenu des dividendes versés, et non au bout de 21 ans et 2 mois comme le laisse supposer l’indice CAC 40 sans prise en compte des dividendes.

Il est évident que si l’indice CAC 40 était calculé en incluant le réinvestissement des dividendes, de nombreux épargnants trouveraient la bourse moins dangereuse et seraient donc plus enclins à investir sur les marchés boursiers. Afin de déterminer la performance réelle des actions sur le long terme, il convient de retenir des indices dividendes réinvestis, soit le CAC 40 GR qui figure d’ailleurs en dernière page de notre lettre mensuelle.

Cette désinformation est un des facteurs explicatifs de l’aversion au risque des français qui les conduit à préférer placer leurs capitaux sur un livret A ou le fonds en euros de leur assurance vie car ces solutions offrent un effet de cliquet permettant d’éviter toute baisse de l’épargne. Une telle démarche est compréhensible dans le cadre d’une gestion de l’épargne de précaution qui, par nature, a besoin d’être disponible à tout moment ce qui n’est pas le cas pour l’épargne de long terme qui doit être investie sur des placements plus rémunérateurs et davantage risqués.

C’est d’ailleurs ce que corroborent les études sur la rentabilité des actifs financiers. En effet, sur longue période, les actions demeurent la meilleure solution pour faire fructifier son épargne. A titre d’exemple, depuis 1800, il n’y a eu que 6 décennies sur 22 au cours desquelles le marché des actions aux USA n’a pas offert la meilleure performance vis-à-vis des autres actifs. Depuis 1950, le S&P 500, l’indice des 500 plus grosses valeurs américaines, a dégagé un rendement positif 55 années sur 73. Un actif réputé risqué qui dégage un rendement positif dans plus de 75 % des cas semble pour le moins appréciable surtout au regard de la distribution des rendements : seules 3 années (1974, 2002 et 2008) ont connu des pertes supérieures à 20 % contre 20 années de performances supérieures à 20 %. Au final, le rendement annuel moyen du S&P dividendes réinvestis ressort à environ 8,50 % par an.

Cette suprématie des actions est également démontrée dans l’étude « 40 ans de performances comparées, 1983-2023 » du 25 avril 2024 menée par l’Institut de l’Epargne Immobilière et Foncière (IEIF) qui compare les principales classes d’actifs entre elles. 

S’agissant d’un établissement axé sur l’épargne immobilière, les produits immobiliers sont très nombreux puisque sont repris les SCPI, les OPCI, les foncières, les logements parisiens, les logements dans la France entière, les commerces, les bureaux et la logistique. A côté de ces actifs de nature immobilière, l’IEIF a ajouté les actions françaises, les obligations, le fonds euro des contrats d’assurance vie, l’or et le livret A. L’inflation figure également dans l’étude afin de mesurer les effets de l’érosion monétaire.

Afin de rendre ces données comparables entre elles, les calculs tiennent compte du réinvestissement des loyers et des dividendes. Ainsi pour les actions françaises, l’IEIF a retenu le CAC All Tradable GR qui intègre les 203 plus grosses sociétés françaises cotées en prenant en compte le réinvestissement des dividendes versés. En clair, les performances tiennent compte des revenus et de la plus-value générée sur les périodes étudiées.

L’étude porte sur les rendements de ces divers actifs sur 40 ans, 30 ans 15 ans et 5 ans. Il en ressort que, sur toutes les périodes étudiées, les actions se placent sur le podium, preuve de leur suprématie lorsqu’on laisse le temps au temps de faire son œuvre !

Soucieux de rendre les résultats de cette étude les plus explicites possible, nous avons ajouté aux performances annuelles moyennes reprises dans l’étude de l’IEIF, une colonne indiquant la somme finale obtenue par une personne qui aurait versé 100 € en début de période.

Ceci permet de se rendre compte, immédiatement, qu’un écart de 2 points de rendement par an qui peut, de prime abord, sembler faible, se révèle en réalité très important sur une durée de 40 ans, générant une variation du capital final du simple au double. Ainsi, un épargnant, qui aurait versé 100 € sur des actions françaises le 31/12/1983, serait à la tête d’un capital de 10 731 € le 31/12/2023, contre seulement 5 233 € pour celui qui aurait préféré investir dans l’immobilier parisien.

Comme le démontre le tableau ci-dessous, sur la période de 40 ans, tous les placements ont fait mieux que l’inflation de sorte que leur rendement réel a été positif. Il en est de même sur la période de 30 ans. En revanche, sur les 15 dernières années, le livret A, les obligations et le monétaire ont délivré un rendement moindre que l’inflation. Sur 5 ans, compte tenu de la reprise de l’inflation depuis 2022, plus de la moitié des actifs recensés n’ont pas enregistré une performance supérieure à l’inflation.

Capture Lettre MC juin 2024

Sur longue période, aucune classe d’actifs n’affiche un rendement négatif. En revanche, sur la période de 5 ans, 3 actifs affichent des pertes liées à la violente remontée des taux d’intérêt survenue en 2022. La baisse la plus élevée concerne les obligations (- 20,15 %), les foncières cotées (- 8,68 %) et les OPCI (- 3,45 %).    

Sur les 5 dernières années, l’investissement dans la logistique, c’est-à-dire dans les entrepôts et les locaux d’activités, prend la tête avec un rendement annuel moyen de 15,60 %. L’explosion du e-commerce et de la modernisation des chaines d’approvisionnement de la grande distribution durant la crise sanitaire est la raison de l’envolée de la performance des activités logistiques.

Il est à souligner que, si l’étude de l’IEIF avait inclus des actifs tels que le Bitcoin ou le Private Equity, les classements auraient été différents. Ainsi, sur les 5 dernières années, le Bitcoin aurait pris la tête avec une performance annuelle moyenne de 63 %, soit un capital de 1 171 € pour 100 € investis et le Private Equity aurait devancé les actions françaises avec une performance moyenne de 14 %, soit un capital de 193 € pour 100 € investis. 

Vous trouverez l’ensemble de ces données au sein d’un tableau synthétique sur notre site internet à l’adresse suivante : https://www.magellanconseil.fr/infos-patrimoniales/performances-des-classes-d-actifs

En conclusion, privilégier les placements sans risque n'offre pas, à long terme, une rémunération optimale de son épargne, ni la meilleure protection de son pouvoir d'achat. Il convient, en effet, de garder en mémoire que tout investissement est guidé par le couple risque rendement. Un investisseur a le choix entre, placer ses capitaux sur des actifs sans risque ou risqués et, dans ce cas, l’espérance de gain doit être supérieure à la solution non risquée. Cette espérance de gain est dénommée prime de risque et correspond donc au rendement supplémentaire exigé pour détenir un actif risqué plutôt qu’un actif non risqué. Par définition, l’actif sans risque est équivalent à l’emprunt d’Etat. Sachant que la prime de risque d’un investissement en actions est en moyenne comprise entre 4 % et 5,50 % et que le taux de rendement de l’OAT 10 ans est actuellement de 3 %, le rendement théorique d’un portefeuille actions est attendu entre 7 % à 8,50 % l’an.

Même si personne ne peut prédire l’évolution des marchés à court terme, en dépit des nombreux aléas (crises économiques, guerres mondiales, attaques terroristes, pandémies, catastrophes naturelles…), les marchés boursiers conservent un trend haussier à long terme atteignant alors de nouveaux sommets et rendent donc incontournable l’investissement en actions. 

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